La précarité menstruelle est l'incapacité à gérer ses menstruations en raison d'un manque de produits menstruels, d'eau, d'installations sanitaires, de gestion de déchets ou de matériel éducatif ou une combinaison de plusieurs de ces éléments. Les femmes, les jeunes filles et les personnes qui ont leurs menstruations éprouvent donc de la honte et s'absentent de leurs activités quotidiennes, telles que l'école, le travail et les loisirs. La précarité menstruelle affecte de manière disproportionnée les personnes qui sont déjà confrontées à des difficultés économiques, et fonctionne en conjonction avec d'autres formes d'oppression et de marginalisation, auxquelles elle s'ajoute.
La précarité menstruelle dans le monde
La précarité menstruelle est une problématique complexe vécue à travers le monde, touchant plus de 500 millions de femmes* qui rencontrent des difficultés à s'occuper de leur santé menstruelle (1). Les tabous et les mythes concernant les menstruations existent dans la plupart des cultures et constituent un énorme obstacle à l'émancipation des personnes qui menstruent. Cela entraîne un accès limité à l'information et à l'éducation sur les menstruations, ce qui exacerbe la honte, l'humiliation et l'isolement.
Le fardeau financier des menstruations
Les produits menstruels sont coûteux et les prix augmentent en raison de l'inflation, des problèmes de chaîne d'approvisionnement et des coûts élevés des matériaux et du transport (2). En plus du coût déjà élevé des produits menstruels, les produits d'hygiène étant considérés comme un luxe, la gestion de la douleur représente une dépense supplémentaire importante, avec les médicaments en vente libre, les coussins chauffants et les bouillottes. Le fardeau financier des menstruations augmente lorsque les femmes et les personnes qui menstruent prennent des congés, car elles ne peuvent pas travailler efficacement en raison de leurs symptômes. Certaines souffrent de douleurs persistantes qui les empêchent de travailler pendant plusieurs jours ou semaines. La honte et l'anxiété liées aux menstruations peuvent également les amener à éviter le milieu de travail (3).
Les femmes ainsi que les personnes trans, non binaires et de genre divers font déjà face à des taux de pauvreté plus élevés (4). L'accès aux soins de santé et à d'autres ressources de soutien peut être difficile, et le coût élevé des menstruations aggrave cette situation. En effet, beaucoup renoncent à acheter des articles essentiels comme des courses pour pouvoir se permettre des produits d'hygiène (5). Les personnes recourent également à des alternatives non hygiéniques et dangereuses. Cela inclut l'utilisation de produits menstruels pendant plus longtemps que recommandé ou l'utilisation d'objets tels que des chaussettes, des journaux ou du papier toilette, ce qui peut entraîner de l'inconfort, des irritations et des infections.
Les organismes communautaires jouent un rôle essentiel dans la distribution de produits menstruels pour répondre aux besoins locaux. Cependant, ils sont souvent sous-financés et dépendent de dons irréguliers, ce qui limite leur capacité à offrir un choix complet de produits en quantités suffisantes. Les personnes qui dépendent de la distribution gratuite, souvent en situation d'itinérance, peuvent se retrouver piégées dans un cercle vicieux, car leur incapacité à satisfaire leurs besoins de base aggrave leur situation précaire (6).
Pistes de solutions
Ici au Canada, une femme sur quatre* est touchée par la précarité menstruelle. Les politiques soutenant l'équité menstruelle commencent lentement à prendre de l'ampleur (7). En 2019, la Colombie-Britannique a promis de fournir des produits menstruels gratuits dans les écoles publiques, et l'Ontario a emboîté le pas en 2021 (8, 9). Cependant, ce sont les seules initiatives à l'échelle provinciale en place. En 2022, le budget fédéral a alloué 25 millions de dollars pour lutter contre la précarité menstruelle, visant à distribuer des produits aux populations vulnérables et à soutenir des initiatives éducatives (10). En décembre 2023, le gouvernement canadien a commencé à fournir des produits gratuits aux lieux de travail régulés fédéralement. À travers le pays, des conseils scolaires et des districts distribuent des produits, mais les efforts restent très inconsistants, rendant l'accès à ces produits aléatoire.
Mettre fin à la précarité menstruelle signifie garantir que les personnes de tous horizons aient accès à des produits menstruels abordables de leur choix, à des installations pour prendre soin de leur hygiène menstruelle et à des ressources de haute qualité. Il est crucial de bien comprendre nos populations les plus vulnérables pour répondre à leurs besoins en rassemblant des données sur les expériences individuelles et en travaillant avec des organismes communautaires qui ont une connaissance de première main. En incluant la représentation locale dans l'élaboration des politiques, des fonds peuvent être alloués pour créer un impact positif et durable.
Les canadien.es ont besoin d'un programme fédéral complet de santé sexuelle et reproductive pour garantir que tous les étudiants reçoivent une éducation menstruelle adéquate, et cela peut être mieux réalisé par le biais du système scolaire (12). La perception publique des menstruations ne changera pas du jour au lendemain, mais encourager des conversations ouvertes contribuera à éliminer les mythes et les idées fausses. Des campagnes publiques peuvent sensibiliser la population à cette problématique et autonomiser les individus, qu'ils menstruent ou non.
De nombreuses marques canadiennes qui fabriquent des produits menstruels durables et non toxiques se battent pour l'équité menstruelle. Elles œuvrent à accroître la distribution gratuite de produits et à fournir des solutions pour les lieux de travail, les écoles et d'autres institutions. Peu importe le parcours financier d'une personne, être surpris par ses règles peut être déstabilisant, et il est important de pouvoir accéder à des produits sans tracas.
Dignité mensuelle s'associe aux membres de la communauté montréalaise et au-delà pour fournir des produits menstruels aux personnes en situation de vulnérabilité et partager des outils éducatifs pour déstigmatiser les expériences menstruelles.
* Cette statistique concerne les femmes cisgenres et ne prend pas en compte les expériences des personnes trans, non binaires et non conformes au genre qui menstruent.
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